Traduction par Raphaël Kempf
Pendant que les opérations militaires se déchainent sur Gaza, le collectif Activestills, composé de photographes israéliens, palestiniens et internationaux, rappelle par l’image la lutte au long cours que mènent les activistes palestiniens pour leur liberté et leur terre. Un quotidien fait d’occupations, de camps montés ad hoc pour protester contre la colonisation israélienne et répéter qu’on ne peut faire taire par les armes.
Dans le cadre de son travail de visibilisation de la lutte populaire palestinienne, Activestills a documenté chacun des principaux camps de protestations, créés comme moyens d’action directe pour résister à la confiscation continue de terres en Cisjordanie pour la colonisation israélienne.
Le camp Ein Hijleh est resté sur pied sept jours : de loin le plus long des camps de protestation établis depuis 2013. Le premier d’entre eux, le village Bab al-Shams, avait été construit pour protester contre les colonies israéliennes à « E1 », une zone-clé à l’est de Jérusalem où la colonisation – incessante – menace de couper en deux la Cisjordanie et de séparer Jérusalem du reste des territoires occupés, privant ainsi un hypothétique État palestinien de toute assise territoriale.
Il y a eu, parmi les autres camps de protestation, l’éphémère Al-Manatir proche d’un avant-poste d’une colonie israélienne surplombant le village de Burin, au nord de la Cisjordanie, ainsi que Ahfad Younis, un quartier de Bab al-Shams, construit pour protester contre une visite de Barak Obama. D’autres actions plus modestes dans la région de Bethléem et sur les collines au sud d’Hébron ont été démantelées presque dans la foulée de leur création.
Les camps ont toujours été établis avec l’autorisation des propriétaires des terrains. Mais en raison de leur proximité avec des colonies israéliennes ou des bases militaires, ainsi que de la nature politique de leur présence, les autorités israéliennes les ont expulsés de force et systématiquement démolis. Les interpellations d’activistes ont souvent été violentes et nombre d’entre eux ont dû être hospitalisés.
Lorsque le camp d’Ein Hijleh a été créé, au cours des négociations parrainées par les États-Unis, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait déjà clairement affirmé qu’il « n’avait l’intention de déraciner aucun citoyen israélien » de la Cisjordanie, et il avait insisté sur la nécessité de garder le contrôle sur la vallée du Jourdain. En plein milieu de l’actuelle offensive à Gaza, il a été encore plus direct en affirmant qu’il « ne peut pas y avoir de situation, quel que soit l’accord, où nous abandonnerions le contrôle de la sécurité sur le territoire situé à l’ouest du Jourdain »(source).
Tandis que la colonisation et les offensives militaires israéliennes se poursuivent en toute impunité, des actions directes non violentes comme les camps de protestation palestiniens ont été l’un des rares moyens de créer une situation alternative sur le terrain.
Comme l’ont dit les organisateurs du village de protestation d’Ein Hijleh, la campagne intitulée Melh al-Ard (le Sel de la Terre) a été créée dans le but de « refuser le statu quo politique, en particulier alors que se déroulent des négociations inutiles qui détruisent les droits de notre peuple à l’émancipation et les privent de toute revendication de leur terre ».
Le collectif Activestills a été créé en 2005 avec la conviction que la photographie est un vecteur de transformation sociale et politique. Il se sert du pouvoir des images pour sensibiliser le public à des questions qui sont généralement absentes du débat. Plutôt que d’adopter une approche consensuelle et soi-disant objective, Activestills considère que son travail participe du combat contre toutes les formes d’oppression, de racisme et contre les violations des droits humains fondamentaux.
L’essentiel du travail d’Activestills porte sur des sujets liés à Israël et la Palestine, comme la lutte populaire palestinienne contre l’occupation israélienne, le destin des demandeurs d’asile africains, les luttes pour la justice sociale en Israël et l’opération militaire israélienne en cours à Gaza. Activestills comprend aujourd’hui huit membres et sept contributeurs, des photographes israéliens, palestiniens et internationaux.