Aux États-Unis comme en France, la minorité asiatique est souvent décrite comme un véritable modèle d’intégration, fondée sur le travail et la discrétion. Cette représentation, si généreuse qu’elle se croit, occulte les discriminations dont cette minorité est l’objet, et exige qu’elle reste à sa place dans une hiérarchie raciale. Or, de nombreuses voix ont remis en cause de l’intérieur et montré le coût du mythe de la minorité modèle. Retour sur l’histoire de la revue Gidra qui, de 1969 à 1974, a servi de matrice à un activisme souvent méconnu, même chez les Asiatiques-Américain⋅es…
Traduction par Elvina Le Poul et Xavier Bonnefond
Texte original : « The Forgotten History of America’s Radical Asian Activists », Splinter News, 6 déc. 2017
L’une des images les plus tenaces des manifestations contre la guerre du Viêt Nam est cette photographie controversée de Jane Fonda, les cheveux bruns coupés court, posant sur un canon antiaérien au Nord-Viêt Nam 1. Surnommée « Hanoi Jane », son visage est souvent parmi les premiers qui viennent à l’esprit lorsqu’on pense au mouvement pacifiste. Les activistes qui racontent encore aujourd’hui leur participation à ce mouvement sont la plupart du temps blanc⋅hes 2. En revanche, la dissidence Asiatique-Américaine semble à peine exister – elle est d’ailleurs quasiment absente de la liste des personnes interviewées dans le documentaire The Vietnam War, l’immense succès populaire du réalisateur Ken Burns 3.
Pourtant, deux mois avant le séjour de Jane Fonda à Hanoï, un journal asiatique-américain radical intitulé Gidra sapait cette idée. Sur la couverture du numéro de mai 1972, une illustration met en scène un officier blanc ordonnant à un soldat asiatique-américain : « Tue ce niak, espèce de niak ! » On peut lire dans ses pages un texte décrivant la participation des Asiatiques à une marche qui s’était tenue peu de temps auparavant à Los Angeles, en même temps qu’un ensemble de manifestations rassemblant près de 100 000 personnes dans tout le pays. Avec le ton familier d’un activiste qui n’en est pas à sa première action politique, Steve Tatsukawa relate l’histoire de cette journée : « Un contingent asiatique ensommeillé s’est retrouvé au croisement entre la Bronson Avenue et Eighth Street… C’était l’un des dix-sept collectifs à prendre part à la manifestation et on sentait que les choses avaient été manigancées pour que nous soyons en troisième ligne, juste après les Chicanos et les vétérans des GI. »
Gidra – qui tire son nom d’une déformation de « King Ghidorah », un kaiju 4 de la franchise Godzilla – a existé pendant cinq ans, de 1969 à 1974. Il a été lancé par cinq étudiant·es de la fac de Los Angeles (UCLA) qui ont décidé de mettre chacun 100 $ de leur poche (« C’était une somme considérable pour des étudiant·es à l’époque », se rappelle Mike Murase, l’un des fondateurs de Gidra) afin d’assurer à leur journal une indépendance éditoriale vis à vis de l’université. Le collectif a publié des articles sur tout : la guerre, la crise de la drogue qui sévissait parmi la jeunesse japonaise-américaine, mais aussi des recettes et des tutoriels pour réparer ses toilettes.
Émergence d’une identité politique
Aujourd’hui, le qualificatif « asiatique-américain » fonctionne essentiellement comme une catégorie démographique, mais à l’origine, il a été conçu comme une identité politique. Et Gidra s’est trouvé là pour documenter cette affirmation.« Ça a été la première voix du mouvement asiatique-américain », raconte Karen Ishizuka, autrice du livre Serve the People: Making Asian America in the Long Sixties 5. Et d’ajouter : « On a vraiment pu assister en temps réel à l’éclosion de ce concept d’identité politique, et constater la manière dont il a été fabriqué. » Dans le premier numéro du journal, Larry Kubota signe un article sur le pouvoir jaune : « C’est un nouveau rôle pour les Asiatiques-Américain·es. Il porte un rejet du stéréotype de l’Oriental·e passif·ve et symbolise la naissance d’un·e nouvel·le Asiatique – un·e Asiatique qui reconnaîtra et combattra les injustices. »
En me plongeant dans les pages de Gidra, c’est sa voix qui m’a le plus interpellée – irrévérencieuse, intelligente, fièrement asiatique et radicale. Je découvrais là une histoire politique qui m’était vaguement familière, mais qui ne s’était jamais présentée clairement à mes yeux : l’incarnation d’un radicalisme asiatique-américain sans complexe, tout à fait contraire à la figure de l’immigrant travailleur et discret qui domine l’imaginaire courant.
Le journal s’est montré résolument solidaire des groupes du Black Power ou du mouvement chicano, convaincu que les Asiatiques ne pourraient atteindre l’égalité que si le racisme envers chacune des minorités était éliminé. Gidra a également mis en lumière un racisme envers les Asiatiques-Américain·es qui aurait bien pu passer inaperçu. Le journal s’est distingué tant en témoignant du licenciement d’un coroner municipal de Los Angeles asiatique-américain – une décision qui fut annulée par la suite –, qu’en soulignant le racisme et le sexisme qui traversaient les perceptions que les soldats américains avaient des femmes vietnamiennes. (Un GI asiatique-américain rapporte comment on leur apprenait dans les camps d’entraînements que les vagins des femmes asiatiques devraient être « débridés, tout comme leurs yeux 6 ».)
Essaimer la dissidence
Aujourd’hui, le racisme anti-asiatique a peut-être évolué – et il n’est certainement pas perçu au même degré que les racismes anti-noir ou anti-hispanique – mais il est loin d’avoir disparu. Lorsque nous entendons Trump déclarer devant des foules conquises que la Chine « viole notre pays » et que les Chinois·es ont commis la « plus grande spoliation de l’histoire du monde » en volant nos emplois, on nous rappelle que notre place dans la hiérarchie raciale américaine reste bien conditionnelle. Tandis que le gouvernement déploie des officiers ICE (Immigration and Customs Enforcement) 7 près des églises et des écoles, que le président encourage la police à se montrer « brutale », et qu’un soutien notoire de ce dernier mentionne l’internement des Japonais·es-Américain·es 8 comme un « précédent » pour la mise en place d’un fichage des musulman·es, la politique éditoriale antisécuritaire de Gidra semble, aujourd’hui comme hier, des plus pertinentes.
Il est difficile de mesurer l’impact qu’a pu avoir Gidra – le journal n’était imprimé qu’à 4 000 exemplaires –; mais parce qu’il était animé par une équipe de bénévoles en perpétuelle recomposition, des centaines de personnes ont été impliquées à un moment ou à un autre dans sa production. Si Gidra présentait des limites – le journal était géré principalement par des activistes japonais·es-américain·es et son équipe était majoritairement masculine – de nombreux⋅ses activistes asiatiques-américain·es ont fait leurs premières armes au sein du journal. Et beaucoup d’entre elles et eux ont poursuivi leur engagement dans les décennies qui ont suivies en exerçant d’autres activités au sein d’une communauté élargie. Deux des rédacteurs et rédactrices de Gidra avec lesquel·les j’ai échangé, Mike Murase et Evelyn Yoshimura, travaillent encore pour le Little Tokyo Service Center, une association qui fournit un ensemble de services sociaux à la communauté asiatique-américaine de Los Angeles. Essaimant à tout vent, le journal a su être un terreau essentiel à bon nombre d’initiatives.
Un activisme invisibilisé
Je suis tombé sur Gidra presque complètement par hasard. Logé dans une note de bas de page d’un texte que je lisais à l’occasion de la rédaction d’un autre article, ce nom inhabituel a attiré mon attention. Traversant pour la première fois ses archives numériques, méticuleusement préservées grâce au Densho Project, j’étais certaine de n’avoir jamais rien vu de semblable. Puis, en interrogeant des personnes à son sujet, je me suis sentie presque honteuse d’avouer que je venais de le découvrir. C’est un journal dont beaucoup disent qu’il est la « voix du mouvement asiatique-américain 9 ». En tant que jeune journaliste politique asiatique-américaine, je suis censée être assez calée sur ces sujets. Or je n’en avais jamais entendu parler.
Gidra est la carte routière que j’aurais aimé avoir enfant. Tandis que je me politisais, j’ai souvent eu le sentiment d’avancer à tâtons au cœur d’une tradition d’activisme politique asiatique-américain. J’ai grandi confortablement au sein de la classe moyenne, dans une ville rurale du nord-est des États-Unis, peuplée presque entièrement de Blanc·hes. Ma mère, qui a quitté Taïwan pour s’installer là à l’âge adulte, en savait à peu près autant que moi sur la politique et l’histoire de ce pays, entre autres parce qu’elle lisait la nuit mes manuels scolaires de collégienne.
Et dans ces manuels, les Asiatiques-Américain·es sont rarement représenté·es comme des activistes politiques. En grandissant, nous apprenons surtout l’histoire de l’internement des Japonais·es-Américain·es et les manifestations contre la guerre du Viêt Nam (souvent organisées par des non-Asiatiques). Avec un peu de chance, on nous enseigne la Loi d’exclusion des Chinois·es 10 ou le mouvement REDRESS 11. Mais imaginer avoir dans les écoles publiques des conversations plus nuancées – au sujet, disons, de la différence de traitement dont les asiatiques au teint pâle et ceux au teint plus foncé sont l’objet aux États-Unis 12 – semble pratiquement impensable.
Dans les journaux, il est essentiellement question d’un vote asiatique apolitique 13 et dépassionné 14. Lorsqu’il arrive que des enquêtes se penchent sur des Asiatiques-Américain·es politisé·es, ils appartiennent la plupart du temps au camp conservateur, comme celles et ceux qui militent contre la discrimination positive 15 et les villes sanctuaires 16. Si l’on sonde Google pour trouver des « activistes Asiatiques-Américain·es célèbres », le moteur de recherche nous livre une liste vertigineuse de trois noms.
Une minorité modèle ?
Un tel effacement n’est pas bénin, au contraire, puisqu’il continue à légitimer les hiérarchies racistes. L’identité politique asiatique-américaine a été rendue impotente par des milliers de silences. Le récit prédominant est encore celui de la minorité modèle – selon lequel nous avons brillamment dépassé une histoire touchée par le racisme grâce à l’éducation, à beaucoup de travail et à notre capacité à faire profil bas. Cette tactique vise à la fois à vilipender d’autres groupes minoritaires comme les Noir·es américain·es (si les Asiatiques sont capables de prospérer aux États-Unis, pourquoi pas eux ?) et à uniformiser une population composée de nombreux sous-groupes – et pas seulement les Asiatiques de l’Est auquel on pense en général – qui continuent à subir le racisme et la pauvreté.
Considérons, par exemple, le récit de la manière dont les Japonais⋅es-Américain⋅es ont persévéré après leur incarcération pendant la Seconde Guerre mondiale. Comme l’a décrit l’historienne Ellen Wu dans un entretien du Washington Post : « Les Japonais⋅es-Américain⋅es ne sont pas vu⋅es comme des personnes pouvant accomplir une quelconque action directe, on ne les considérait pas comme étant en train de protester. Un coup dur leur était tombé dessus, ils⋅étaient passé·es à autre chose, et tout allait bien pour elles et eux. Ces histoires étaient utiles idéologiquement. Ils et elles sont devenu⋅es un modèle de coopération politique. »
Gidra ne joua pas le jeu. En 1971, elle révéla l’histoire de Mary Hochiyama (connu aujourd’hui comme Yuri Kochiyama), prisonnière politique en tant que Japonaise-Américaine. Au lendemain d’une opération pour un ulcère, son père, qui tenait un marché de poisson, fut l’une des premières personnes à être embarquée. Un mois plus tard, il fut ramené chez lui en ambulance pour y mourir le lendemain matin. Selon Kochiyama, le FBI les prévint que toute personne se rendant aux funérailles de son père serait surveillée. Dans la suite de son témoignage, la note mettait en garde : « C’est arrivé ici. Cela peut encore arriver – à vous », et ressemblait fort à un « appel à passer à l’action » destiné à dresser toutes les personnes opprimées contre l’État policier états-unien.
Nina Wallace, responsable de la communication de l’association Densho, m’a confié : « Gidra montre que cette histoire des Asiatiques-Américain⋅es se battant, se rassemblant, et tentant de changer les choses, a toujours été présente. […] Et pas seulement celle des petit⋅es Américain⋅es tranquilles à laquelle on peut penser. »
Il y a déjà plusieurs décennies de cela, Gidra combattait donc aussi le stéréotype de la minorité modèle. Dans son article publié dans le premier numéro, Kubota écrit que « traditionnellement, les Asiatiques ont passé beaucoup de temps à observer le comportement et les manies des Blanc⋅hes. Nous avons essayé d’agir, de parler comme elles et eux, de leur ressembler, et d’être comme elles et eux sous tous les aspects… Il est temps de comprendre que les Blanc⋅hes ne peuvent pas être pris⋅es comme modèles. »
Pourtant les préjugés ont perduré, jusqu’à aujourd’hui. En avril 2017, en réponse aux accusations de racisme anti-asiatique contre l’évacuation de David Dao par la compagnie United Airlines 17, Andrew Sullivan du magazine New York a évacué l’argument, écrivant : « De nos jours, le groupe des Asiatiques-Américain⋅es est parmi les plus prospères, les mieux éduqués, et connaissant le plus de réussite aux États-Unis. Comment cela se fait-il ? Ça ne peut pas venir du fait qu’il a entretenu de solides structures familiales biparentales, a disposé de réseaux sociaux prenant soin de chacun⋅e, a énormément insisté sur l’éducation et le dur labeur, et a par là retourné les stéréotypes erronés, faux, en de nouveaux jugements positifs et réels. Serait-ce possible 18 ? »
C’est une argumentation qui ressemble à s’y méprendre à celles des journaux des années 1960, comme dans cet article de US News qui affirmait : « Allez faire un tour à “Chinatown” et vous y trouverez une minorité raciale importante s’extrayant des difficultés et de la discrimination pour devenir un modèle d’estime et de réalisation de soi pour les États-Unis d’aujourd’hui. »
Que les Asiatiques-Américain⋅es, et particulièrement les Asiatiques de l’Est, aient historiquement promu le stéréotype de la minorité modèle qui les fait tendre vers la normalité blanche, et qu’ils et elles en aient bénéficié, voilà une vérité dérangeante. Comme l’historienne Ellen Wu le faisait remarquer dans le Washington Post : « Le mythe de la minorité modèle que nous connaissons aujourd’hui fut principalement un effet secondaire des tentatives passées des Asiatiques-Américain⋅es pour être accepté⋅es et reconnu⋅es en tant qu’êtres humains. »
Bégaiements d’une identité politique
Il en résulte une communauté qui se découvre avec « le langage étriqué d’un peuple qui ne sait pas encore parler d’injustice », comme l’a formulé l’écrivain et éditeur Jay Caspian Kang. Un état de fait qui apparaît régulièrement lors des débats portant sur la discrimination positive, et a été encore plus visible récemment lors des manifestations de février 2017 au moment de la condamnation pour homicide involontaire du policier du NYPD Peter Liang, pour avoir abattu Akai Gurley, un jeune homme noir de 28 ans. Les Sino-américain⋅es ont vu une manifestation de racisme dans le fait que Liang fut le premier policier condamné dans l’exercice de ses fonctions à New York en près de dix ans, et ils et elles se sont engagé⋅es dans des manifestations où l’on pouvait lire des pancartes énonçant« Peter Bouc-émissaire ».
D’un côté, ces récriminations n’étaient pas dénuées de vérité ; les policier⋅es blanc⋅hes ont toujours profité d’une impunité qui ne s’étend pas nécessairement à leurs collègues issu⋅es des minorités. Mais le fait que le premier tollé politique majeur émanant des Asiatiques-Américain⋅es depuis des années soit des manifestations contre la condamnation d’un tir policier sur un homme noir révèle tout de même une identité politique moderne des plus grossières.
Néanmoins, si cette dernière est bel et bien atrophiée, ce n’est pas nécessairement parce qu’aucune identité radicale n’a jamais existé, mais plutôt parce qu’on nous dit qu’il en est ainsi. Une part de responsabilité en revient au silence de la communauté elle-même ; comme l’écrit J. C. Kang à propos des manifestations pour Liang : « Parce qu’il a été historiquement dans l’intérêt de personnes comme moi de ne jamais discuter de ces sujets, même en privé, je n’ai pas le vocabulaire pour en parler 19. »
Une autre raison consiste en ce que beaucoup parmi nos parents ne sont pas né⋅es aux États-Unis et se trouvent par conséquent dépourvu⋅es d’une compréhension fondée sur leur vécu de l’histoire raciale du pays – 73 % de la population adulte asiatique actuelle des États-Unis est née dans un autre pays (contre, par exemple, 48 % de la population adulte hispanique). « Je pense que ce fait précis, qu’il y ait un pourcentage plus important de personnes de première génération, a tendance à affecter l’ensemble du discours, m’a confié Murase. C’est un peu comme recréer sans cesse la minorité modèle et la foi en elle. »
Mais la raison première demeure que, au fil des décennies, rabaisser l’identité politique des Asiatiques-Américain·es a profité aux personnes au pouvoir. De nos jours, il est clair que le mythe de la minorité modèle est indéfendable non seulement quand il s’agit de combattre la suprématie blanche et d’encourager la solidarité transraces ; un tel mythe s’avère également inopérant en tant que tactique de survie. La montée de Donald Trump et de sa rhétorique révèlent qu’un autre mythe néfaste – les Asiatiques comme péril jaune – a également la peau dure. Alors que Trump terrifie la communauté des sans-papiers, il est bon de méditer sur le fait que les Asiatiques constituent le groupe d’immigré⋅es sans-papiers à la croissance la plus rapide. Et même si l’on dispose de peu de données, celles existantes révèlent que les crimes de haine 20 contre les Asiatiques-Américain⋅es sont en augmentation, tout comme les autres crimes de ce type sous l’ère Trump.
Raviver Gidra
Les publications telle Gidra nous rappellent qu’une identité politique radicale et éloquente, bâtie sur une solidarité inter-raciale peut exister pour les Asiatiques-Américain⋅es. « Plus jeune, j’ai trouvé Gidra très inspirante, m’a raconté Brian Niiya du Densho Project. Le simple fait de savoir que quelqu’un⋅e avant vous faisait déjà ce type de choses. » De nombreux⋅ses militant⋅es sont déjà en train de travailler dans ce sens, que ce soit les ancien⋅nes membres de Gidra ou bien les jeunes gens s’organisant en faveur des personnes noires et écrivant des lettres à leurs parents sur l’importance de soutenir le mouvement Black Lives Matter.
« Gidra est née au commencement du mouvement des Asiatiques-Américain⋅es, explique un ancien membre dans le dernier numéro d’avril 1974. Est-ce que sa mort est synonyme de fin du mouvement ? J’espère que non. » Pourtant, des décennies plus tard, la plus grande menace pour le mouvement ne semble pas être la mort d’une revue comme Gidra – c’est que nous pourrions bien complètement oublier qu’elle a seulement existé.
Pour aller plus loin
• Tous les exemplaires de Gidra en ligne sur le site de la fondation Densho.
• « The Forgotten Zine of 1960s Asian-American Radicals », Jaeah J. Lee, Off Topic.
• Une vidéo sur Gidra réalisée par le Watase Media Arts Center au Musée national américain-japonais de Los Angeles, lors de l’exposition « Drawing the Line: Japanese American Art, Design and Activism » en 2011-2012 »:
- « How Jane Fonda’s 1972 trip to North Vietnam earned her the nickname “Hanoi Jane” », Colby Itkowitz, The Washington Post, 21 sept. 2017. ↩
- « ’There Was All This Chaos’: Vietnam-Era Antiwar Activists Reflect », Daniel S. Levy, Time, 30 janv. 2015. ↩
- The Vietnam War est une fresque documentaire qui retraverse l’histoire de la guerre du Viêt Nam en dix épisodes, dont le premier a été diffusé sur PBS en septembre 2017. ↩
- King Ghidorah est un monstre qui apparaît sous la forme d’un dragon à trois têtes dans la série Godzilla des studios Tôhô, et qui est ennemi récurrent de Godzilla. ↩
- Verso Books, 2016. ↩
- En anglais, « Asian women’s vaginas “were slanted, like their eyes.” » ; l’expression « joue » sur le rapprochement : slant-eyed = yeux bridés / To slant = présenter de manière tendancieuse. ↩
- Traditionnellement, les officiers ICE, chargés de l’arrestation et de la détention des personnes présentes illégalement sur le territoire, mènent leurs opérations sur les lieux de travail des personnes concernées et restent à l’écart des lieux de culte et des écoles, considérées comme étant sensibles. Sous le gouvernement Trump, ces précautions ont été levées, pour en savoir plus, voir ici. ↩
- Dès 1942, environ 110 000 civil·es ressortissant·es japonais·es et américain·es d’origine japonaise ont été incarcéré⋅es dans des centres appelés « War Relocation Camps », à la suite de l’attaque de Pearl Harbor, durant la Seconde Guerre mondiale. ↩
- « GIDRA: The Voice of the Asian American Movement », Yoshimi Kawashima, Discover Nikkei, 12 janv. 2012. ↩
- Loi d’exclusion des Chinois· (Chinese Exclusion Act) est une loi fédérale américaine votée le 6 mai 1882, à la suite des révisions de 1880 du Traité de Burlingame de 1868. Elle prévoit la suspension de l’immigration de travail en provenance de la Chine. La loi resta en vigueur pendant dix ans, avant d’être renouvelée, puis élargie aux ressortissant·es japonais·es. Pour l’historienne Beth Lew-Williams, cette loi a créé le concept d’« étranger inassimilable ». Elle décrit l’histoire qui aboutit à cette législation dans The Chinese Must Go: Violence, Exclusion, and the Making of the Alien in America. ↩
- Le mouvement Redress se réfère aux efforts collectifs et aux luttes pour l’obtention d’une restitution des droits civils, d’excuses ainsi que de compensations financières de la part du gouvernement fédéral états-unien pendant les six décennies qui ont suivi l’internement des Japonais·es-Américain·es pendant la deuxième Guerre Mondiale. Pour en lire davantage, voir l’article de l’encyclopédie Densho et jacl.org. ↩
- « ‘You look like the help’: the disturbing link between Asian skin color and status », Mari Santos, Splinter News, 25 août 2016. ↩
- « Overcoming Asian-American Apoliticism », Kimberly Ta, Huffington Post, 4 nov. 2016. ↩
- « Apathetic Asian Americans ? », Stanley Karnow, The Washington Post, 29 nov. 1992. ↩
- « Affirmative Action Battle Has a New Focus : Asian-Americans », Anemona Hartocollis et Stephanie Saul, The New York Times, 2 août 2017. ↩
- Les villes sanctuaires sont, aux États-Unis, celles qui refusent d’appliquer une loi imposée par le gouvernement fédéral parce qu’elles estiment qu’elle est injuste. Voir « These first-generation Chinese Americans are vigorously opposing sanctuary laws », Bill Turque, The Washington Post, 20 mars 2017, et « Asians Against Maryland Becoming a Sanctuary State », Calvert Beacon, 2017-03-05. ↩
- Le vietnamien-américain David Dao a été maltraité et battu avant d’être débarqué de force d’un avion de United Airlines au motif que le vol était en surréservation. Lire à ce sujet : « Why It Matters That the United Dragging Victim Is Asian », Clio Chang, The New Republic, 11 avr. 2017. ↩
- « Why Do Democrats Feel Sorry for Hillary Clinton? », Andrew Sullivan, New York Magazine, 14 avr. 2017. ↩
- « How Should Asian-Americans Feel About the Peter Liang Protests? », art. cité. ↩
- Notion apparue dans les années 1980 aux États-Unis, le crime de haine désigne les violences commises en raison d’un mobile discriminatoire. L’auteu·re d’un crime de haine a choisi sa cible en raison de l’hostilité qu’il éprouve envers le groupe auquel elle appartient. On parle dans ce cas de traumatisme indirect ou de « victime collective », car à travers l’individu touché par l’infraction, c’est toute une communauté qui est en réalité visée. En France, la loi ne prend pas en compte cette notion. Seules sont punies « les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe » si elles sont précédées, accompagnées ou suivies de propos racistes, ce qui bien sûr n’est pas toujours le cas. Voir « “La race tue deux fois.” Socio-histoire des crimes racistes et de leur traitement. Entretien avec Rachida Brahim », par Mickaël Correia et le collectif Angles Morts, sur le site de Jef Klak. ↩